lundi 15 décembre 2014

Québec — anglais intensif pour tous les francophones, pas de français intensif pour les immigrés ?


Dans la région de Québec, plus de 2000 élèves venant des quatre coins du monde doivent apprendre à maîtriser une langue complexe, le français, pour poursuivre leur parcours scolaire. Or seulement 3 % d'entre eux sont assis dans une classe d'accueil, alors que la quasi-totalité sont plutôt intégrés à des classes ordinaires, avec quelques heures de francisation par semaine. Une situation dénoncée haut et fort par des enseignantes, qui estiment que cette formule ne répond pas du tout à leurs besoins.

Une jeune fille népalaise, que nous appellerons Shirisha, a 13 ans. Elle ne comprend pas un mot de français, selon son enseignante de francisation. Pourtant, elle est assise dans une classe ordinaire de sixième année, dans une école de Québec. Comme plusieurs autres élèves allophones, elle ne bénéficie que de quelques heures de francisation par semaine.

Sa place serait plutôt dans une classe d'accueil, affirme son enseignante, qui refuse d'être identifiée, puisque la situation est délicate à dénoncer, explique celle que nous appellerons Isabelle.

Mais les classes d'accueil, où l'élève apprend à temps plein à maîtriser sa nouvelle langue, sont rares à Québec. Très rares. Sur 2221 élèves qui ont des mesures de francisation, seulement 76 fréquentent une classe d'accueil à temps plein selon une recension effectuée par Le Soleil (voir plus bas). La classe d'accueil est réservée aux élèves «les plus amochés», explique Isabelle. Plusieurs viennent de camp de réfugiés et n'ont pas été scolarisés dans leur langue maternelle.

Annie-Christine Tardif trace par ailleurs un parallèle avec l'anglais intensif, que le gouvernement Couillard aimerait étendre à la majorité des élèves de la fin du primaire. «Il faut qu'il y ait de l'anglais intensif pour tout le monde, mais pourquoi il n'y aurait pas de français intensif pour les élèves allophones?» demande-t-elle.

Celle-ci rappelle que la recherche a démontré que le «saupoudrage» de quelques heures par semaine n'est pas la façon la plus efficace d'apprendre une deuxième langue, un argument maintes fois évoqué en faveur de la formule de l'anglais intensif.

Pour l'instant, les quelques heures de francisation par semaine ne permettent pas à une majorité d'élèves allophones de bien maîtriser leur deuxième langue et de rattraper leur retard scolaire, affirment les enseignantes interrogées. Résultat: une fois arrivés au secondaire, des élèves comme Shirisha se retrouveront probablement dans des groupes d'adaptation scolaire, toujours avec quelques heures de francisation par semaine.

Une formule vouée à l'échec, selon Sophie. «À long terme, on forme des décrocheurs.»

Source : Le Soleil


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